La géographie du pétrole au Moyen-Orient

« Qui dit hydrocarbures pense au Moyen-Orient. Pour être plus précis, ce sont les régions du golfe Persique et de l’ouest iranien qui en sont le plus richement dotées. Les principaux gisements se trouvent disposés de part et d’autre d’un axe orienté nord-ouest/sud-est. Ainsi, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Koweït, le Qatar, l’Iran et l’Irak sont-ils très bien dotés tandis que les pays les plus éloignés de cet axe sont beaucoup moins riches, à l’instar de l’Égypte ou de la Syrie […]
Avec plus de 50 % des réserves prouvées de pétrole et 40 % de celles en gaz, le Moyen-Orient est ainsi le cœur de la production mondiale d’hydrocarbures. Cette abondance des gisements combinée à leur faible profondeur explique la faiblesse de leurs coûts d’extraction et leur compétitivité indétrônable. Ils offrent aux pays de la région une grosse rente mais représentent également une série de difficultés géopolitiques […] Avec la montée de l’économie pétrolière, le canal de Suez est devenu un point névralgique. L’abondance énergétique de la région oblige en effet à la sécurisation des voies d’acheminement […]
Tout comme le canal, les détroits du Moyen-Orient (Ormuz, Bab-el-Mandeb et Bosphore) sont des points particulièrement stratégiques. Constituant un point de resserrement des voies de circulation, ils correspondent à des zones facilitant la surveillance mais aussi des tentatives d’entraves au commerce : quelque 30 % des volumes mondiaux d’hydrocarbures empruntent ces couloirs.
Haut lieu des affrontements de la guerre entre l’Irak et l’Iran […], Ormuz est le détroit le plus important au monde en terme de trafic pétrolier […] Les États-Unis y ont déployé un dispositif impressionnant : la cinquième flotte américaine basée à Manama au Bahreïn, des patrouilles de porte-avions nucléaires et des renforts de la base de Diego Garcia dans l’océan indien. […]
L’héritage des frontières tracées dans les années 1920, la production d’idéologies de plus en plus exclusives et de régimes politiques autoritaires, ainsi que la singularité géographique d’une région marquée par l’abondance et la rareté ont créé un état de conflictualité dont le Moyen-Orient ne parvient pas à s’extraire. Comme un orage qui tournoie de façon incessante dans un ciel agité, la guerre finit par s’abattre régulièrement sur l’un ou l’autre des territoires du Moyen-Orient. Hier les guerres inter-étatiques israélo-arabes (1948, 1967 et 1973), le conflit irako-iranien (1980 à 1988) et les interventions internationales (1991) puis américaine (2003) en Irak, aujourd’hui les guerres civiles en Syrie et au Yémen. »

 

Pierre BLANC et Jean-Paul CHAGNOLLAUD, Atlas du Moyen-Orient, Éditions Autrement, 2016, p. 52, 58, 59 et 69