Une gouvernance globale sans gouvernement global (STIGLITZ, 2006)
« C’est […] un lieu commun d’observer que la mondialisation se développe et qu’il en résulte une intégration plus grande des pays du monde qui, du coup, se rapprochent les uns des autres. Ce rapprochement [est] rendu possible par l’abaissement des coûts de transport [et] de communication. […]
Le problème est que cette action collective exige des mécanismes de prise de décision, que nous pouvons nommer « gouvernance », pour exister. Mais le système international qui s’est développé depuis des décennies […] est un système de gouvernance globale sans gouvernement global. […] Il existe cependant un réseau complexe d’arrangements internationaux, qui, pris ensemble, forment la gouvernance mondiale. Ce réseau comprend de nombreux traités internationaux (par exemple ceux de Montréal et de Kyoto) et un ensemble de lois internationales […]. Qui plus est, de nombreuses décisions touchant à l’économie mondiale sont prises dans le cadre des institutions internationales des Nations Unies, notamment le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale et l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Le problème vient de ce que, faute d’un véritable gouvernement mondial, ces institutions sont gravement défaillantes. Pour commencer, les institutions internationales sont non-démocratiques. […] Au FMI, dont les décisions affectent des millions de personnes de par le monde, un seul pays possède le droit de veto : les Etats-Unis. Les droits de vote sont déterminés par l’étendue du pouvoir économique, telle que fixée à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à quelques ajustements près faits depuis. Ceci explique pourquoi les pays qui font aujourd’hui, et plus encore demain, la croissance mondiale, y sont sous-représentés. »
Joseph STIGLITZ (économiste américain, proche des idées de KEYNES, prix Nobel d’économie en 2001 ; économiste en chef de la Banque mondiale jusqu’en 2000, il se montre critique vis-à-vis du FMI et de la Banque mondiale), « Biens publics et finance globale : la gouvernance mondiale est-elle au service de l’intérêt général ? » in Promouvoir les biens publics, Paris, 2006.