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Golda MEIR relate sa vision des premiers conflits israélo-arabes

Golda MEIR (1898-1978) est une femme politique qui compte parmi les 24 personnalités signataires de la déclaration d’indépendance de l’État d’Israël le 14 mai 1948 à Tel-Aviv. Elle devient ensuite ministre des Affaires étrangères, puis quatrième Premier ministre d’Israël de 1969 à 1975.

 

Donc, nous étions maintenant un fait acquis. La seule question qui demeurât – et si incroyable que ce soit, elle n’est toujours pas résolue – était de savoir comment nous resterions en vie. Non pas « si », mais vraiment « comment ». Le matin du 15 mai, Israël était déjà l’objet d’agressions armées des Égyptiens au sud, des Syriens et des Libanais au nord et au nord-est, des Jordaniens et des Irakiens à l’est. Sur le papier, on eût dit, cette semaine-là, que les Arabes étaient fondés à se vanter d’écraser Israël dans les dix jours à venir.

L’avance la plus implacable était celle des Égyptiens – bien que, de tous nos envahisseurs, ce fussent ceux qui eussent certainement le moins à gagner. ABDALLAH1 avait sa raison ; elle était mauvaise mais elle existait et il pouvait la définir : il voulait le pays tout entier, et notamment Jérusalem. Le Liban et la Syrie avaient aussi leur raison : l’espoir d’être en mesure de se partager toute la Galilée2. L’Irak avait envie de participer au bain de sang et de prendre son petit bénéfice en acquérant une fenêtre sur la Méditerranée, à travers la Jordanie au besoin. Mais l’Égypte n’avait pas un seul vrai but de guerre, si ce n’est de piller et de détruire tout ce que les juifs avaient bâti. En fait, je n’ai jamais cessé de m’étonner de l’ardeur extrême des États arabes à partir en guerre contre nous. Presque du premier jour de la colonisation sioniste jusqu’à maintenant, ils n’ont jamais cessé de se consumer de haine pour nous. La seule explication plausible – et elle est ridicule – est qu’ils ne peuvent tout bonnement pas supporter notre présence et nous pardonner d’exister, et j’ai du mal à croire que les chefs de tous les États arabes aient toujours été si primitifs dans leur raisonnement, et le demeurent.

De notre côté, qu’avons-nous donc fait qui menace les États arabes ? C’est vrai, nous avons refusé de rendre les territoires conquis dans les guerres commencées par eux. Mais conquérir des territoires n’a, en définitive, jamais été le véritable but des agressions arabes. […] Qu’était-ce donc alors ? […] Qui peut le dire ? Quoi que ce fût et que ce soit, cela dure toujours – tout comme nous d’ailleurs – et l’on ne trouvera probablement pas la réponse avant bien des années, quoique je n’aie pas le moindre doute que le jour viendra où les États arabes nous accepteront, tels que nous sommes et pour ce que nous sommes. Bref, la paix dépend et a toujours dépendu, uniquement, d’une seule chose : il faut que les dirigeants arabes admettent notre présence ici.

 

1. Il s’agit d’ABDALLAH, roi de Jordanie de 1946 à 1951.
2. Région du nord d’Israël.

 

Golda MEIR, Ma vie, éditions Robert Laffont, 1975