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Un exemple de tensions en mer de Chine du Sud

« La mer de Chine du Sud a été de nouveau le théâtre d’affrontements entre pêcheurs philippins et garde-côtes chinois. Ces derniers surveillent l’espace que Pékin revendique comme étant sa propriété et repoussent fermement toute embarcation qui s’aventure dans ces eaux. Un bateau de pêcheurs philippins vient d’en faire de nouveau l’expérience. Bien que se considérant dans les eaux philippines, il raconte avoir été prié de quitter, sur le champ, cette zone poissonneuse. Craignant le recours aux canons à eau, très puissants, l’embarcation philippine a préféré rebrousser chemin et éviter tout risque d’affrontement direct, voire de collision, le rapport de forces étant clairement en faveur du navire chinois.

Manille attend d’un jour à l’autre une décision de la Cour permanente d’arbitrage (CPA) de La Haye qui doit statuer sur la légitimité qu’ont, chacun de ces deux États, à revendiquer des droits dans cette zone. Manille demande à la CPA de dire que les revendications chinoises violent la Convention de l’ONU sur le droit à la mer, dont les deux pays sont signataires. Les Philippines vont d’ailleurs faire valoir que la Chine n’a aucun « droit historique » sur cette mer sur laquelle transite une grande partie du trafic maritime international. Au passage, Manille en profite pour dénoncer les ravages irréversibles causés à l’environnement par Pékin en rasant des récifs coraliens pour les transformer en îlots dotés de piste d’envol, de port en eau profonde et de station radar.

Quelle que soit la décision du tribunal, Pékin a déjà fait savoir qu’elle ne la respectera pas, jugeant cette cour non compétente. Et comme pour mieux défier les uns et les autres, les autorités chinoises ont décidé d’organiser, à partir de 2020, des croisières réservées à des citoyens chinois autour de l’archipel des Spratleys, l’un des points les plus disputés. Outre les Philippines, le Vietnam, la Malaisie, Taïwan et le sultanat de Brunei revendiquent aussi une partie de ce territoire. La situation est complexe, car la Chine pratique la politique du fait accompli. Les États-Unis, qui sont liés par des accords de sûreté avec la plupart des pays concernés, envoient des avertissements à Pékin et croisent à proximité des rochers disputés. Les Occidentaux observent une neutralité de bon aloi, estimant qu’une fois le droit de navigation préservé, peu importe finalement de savoir à qui appartient tel ou tel rocher.

Les opposants à l’expansionnisme chinois craignent que la Chine n’utilise ses îles artificielles à des fins militaires et n’obtienne, de facto, le contrôle de la mer et des airs d’une région qui, de plus, recèlerait d’importants gisements d’hydrocarbures. »

 

Michel DE GRANDI, « En mer de Chine du Sud, les tensions restent fortes », Les Echos, 23 juin 2016

La Constitution de la RDA révisée en 1968

Le VIIe Congrès du SED de la RDA (avril 1967), sous l’impulsion de Walter ULBRICHT (1893-1973), secrétaire général du SED de 1950 à 1971, procède à une réécriture de la Constitution est-allemande (1949).

 

Article 1. La République démocratique allemande est un État socialiste de la Nation allemande. Elle est l’organisation politique des travailleurs des villes et des campagnes, qui mettent en Å“uvre le socialisme sous la conduite de la classe ouvrière et de son Parti marxiste-léniniste. […]

 

Article 2. L’ensemble du pouvoir politique de la RDA est exercé par les travailleurs. […] L’alliance solide entre la classe ouvrière, les paysans organisés en coopératives, les intellectuels et toutes les autres couches du Peuple, la propriété socialiste des moyens de production, la planification pour conduire le développement de la société, […] constituent les fondements inaltérables de l’ordre socialiste. […]

 

Article 6. Conformément aux principes de l’internationalisme socialiste, la RDA pratique et développe la coopération dans tous les domaines et l’amitié avec l’URSS et les autres États socialistes. […]

 

Article 12. Les richesses du sous-sol, les mines, les centrales énergétiques, les barrages et les eaux, les richesses naturelles du socle continental, les banques et les établissements d’assurance, les fermes d’État, les moyens de communication, les chemins de fer, les moyens de transport de la navigation aérienne et maritime, les installations des postes et des télécommunications, sont la propriété du Peuple. La propriété privée de ces biens n’est pas admissible. […]

 

Extraits de la Constitution de la RDA du 9 avril 1968

Le Ghana, eldorado pour les investisseurs (2015) ?

Situation socio-économique du Ghana pour le Ministère des Affaires étrangères du Canada en 2015.

Ce document est une fiche technique parmi d’autres destinée à présenter la situation socio-économique de pays avec lesquels le Canada commerce ; elle vise les investisseurs et les entrepreneurs canadiens.

 

« Le Ghana est une démocratie stable et paisible, en bonne voie d’atteindre son objectif de devenir un pays à revenu intermédiaire d’ici 2020. Il est salué comme un nouveau modèle de réussite économique en Afrique : ces dernières années, son taux de croissance a toujours dépassé les 6 %. Depuis 1992, cinq élections démocratiques consécutives y ont eu lieu, et deux transitions de gouvernement se sont déroulées dans la paix. D’autres pays d’Afrique se tournent maintenant vers le Ghana pour obtenir des conseils sur la tenue d’élections.
Depuis 1990, le gouvernement du Ghana a travaillé de près avec la communauté des donateurs et a réduit de près de moitié le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté. Cependant, environ 30 % des Ghanéens vivent toujours avec moins de 1,25 $US par jour. Environ 2 millions de personnes ont un accès limité à la nourriture, et les trois régions du Nord du pays sont régulièrement touchées par des pénuries de vivres. Les enfants sont particulièrement vulnérables : environ 12 % des enfants ghanéens de moins de cinq ans ont un poids insuffisant. En 2012, le Ghana occupait le 135e rang sur 187 pays pour ce qui est de l’indice du développement humain établi par le Programme des Nations Unies pour le développement.
Le Ghana a assez bien réussi à atténuer les répercussions de la crise alimentaire mondiale de 2008 grâce à des programmes d’aide sociale et à d’autres mesures; il a entre autres supprimé les droits d’importation et les taxes sur les aliments et le carburant.
Le Ghana est toujours vulnérable aux effets persistants de la crise économique mondiale. La pauvreté s’est accentuée dans certains groupes de population, surtout les femmes, les agriculteurs et les personnes vivant dans les régions du Nord. »

 

Site du ministère des Affaires étrangères du Canada, avril 2015.

L’aubaine des nouveaux aménagements du canal de Suez (Les Echos, 2015)

« Les armateurs de la marine marchande sablent le champagne. L’Egypte inaugure ce jeudi un nouveau canal de Suez, supprimant un inconvénient majeur du canal historique, une largeur devenue insuffisante du fait de la course au gigantisme des porte-conteneurs. Les bateaux naviguant vers le sud et ceux en direction du nord devaient attendre que la voie soit libre pour s’engager.

L’Egypte a pris le taureau par les cornes, en entreprenant il y a onze mois de cela un chantier pharaonique. Des travaux en accéléré dans la compétition que se livrent Suez et le canal de Panama pour faire passer dans leurs eaux les géants de la mer. Selon l’armateur marseillais CMA CGM, numéro trois mondial du transport maritime, le canal de Suez voit passer environ 18 000 navires chaque année, contre 11 000 pour Panama. Pour l’Egypte, il s’agissait non seulement de prendre en compte le développement du trafic Asie-Europe, mais aussi donc de conserver ses parts de marché, sur les trajets Asie-côte est de l’Amérique. […]

Le trafic va s’accélérer, du fait notamment d’un temps de transit mécaniquement réduit de sept heures – passant de 18 à 11 heures – avec les nouvelles installations. D’ici à 2023, quelque 97 navires pourront emprunter le canal quotidiennement, contre 49 actuellement, affirme l’Autorité du canal de Suez.

Le canal de Suez est un passage stratégique pour les transporteurs maritimes. Il draine près de 8 % du trafic mondial et permet aux navires d’économiser de précieuses heures de transport vers l’Europe, comparativement à un trajet contournant le continent africain. Impossible pour un navire de s’affranchir de ce canal sans naviguer de nombreux jours supplémentaires. D’après CMA CGM, une traversée entre Rotterdam et Singapour dure 9 jours de moins en passant par le canal de Suez qu’en naviguant au large du cap de Bonne Espérance, en Afrique du Sud.

Pour le groupe de transport maritime […], le canal de Suez est « le plus important en termes de trafic » et s’avère « une route stratégique et incontournable du fait de sa situation géographique, à la croisée des lignes desservant les grands marchés mondiaux ». Il a ainsi une longueur d’avance sur le canal de Panama, presque deux fois moins utilisé par l’armateur français.

Néanmoins, les transporteurs pourraient déchanter en constatant une possible augmentation des tarifs de passage sur le canal de Suez. En situation de monopole sur le trajet Asie-Europe, l’Egypte pourrait être tentée de répercuter le coût des travaux sur ses tarifs. Cependant, selon un expert, une hausse des tarifs ne serait pas d’actualité. »

Les Echos, 6 août 2015

Le Livre blanc de la Palestine sous tutelle britannique (mai 1939)

A la suite d’une conférence anglo-judéo-arabe qui se tient à Londres en février 1939, un Livre blanc est publié en mai 1939 dans le but d’apaiser les tensions entre Arabes et Juifs, et de détourner les pays arabes des puissances de l’Axe dans un contexte de marche à la guerre. Le Royaume-Uni, puissance mandataire de la Palestine, revient sur les promesses faites au mouvement sioniste pendant la Grande Guerre. Connu sous le nom de « Livre blanc de CHURCHILL » (alors secrétaire aux Colonies), ce document modère les points énoncés dans la déclaration Balfour, restreignant par exemple le territoire dédié au foyer national juif et relevant les conditions financières d’immigration des juifs.

I. Constitution

[…] Il a été avancé que l’expression foyer national pour le peuple juif offrait la perspective d’une Palestine devenue progressivement un État ou un Commonwealth juif. Le gouvernement de Sa Majesté n’entend pas mettre en cause le point de vue – exprimé par la Commission royale – des chefs sionistes lors de la déclaration Balfour, selon lequel ils estimaient que les termes de la déclaration n’excluaient pas un État juif ultimement. Mais, en accord avec la Commission royale, le gouvernement de Sa Majesté est convaincu qu’intégrée au cadre du mandat comme elle l’a été, la déclaration Balfour ne pouvait en aucune façon signifier que la Palestine serait transformée en un État juif, contre la volonté de la population arabe du pays.

[…] Le gouvernement de Sa Majesté déclare aujourd’hui sans équivoque qu’il n’est nullement dans ses intentions de transformer la Palestine en un État juif. Il considérerait comme une chose contraire à ses obligations envers les Arabes placés sous son mandat, et contraire aux assurances fournies précédemment aux Arabes, que la population arabe de Palestine doive devenir, contre sa volonté, les sujets d’un État juif. […] Depuis la déclaration de 1922, plus de 300 000 juifs ont immigré en Palestine, et la population du foyer national (juif) s’est élevée à quelque 450 000 âmes, soit environ un tiers de la population entière du pays. Et la communauté juive n’a pas manqué de tirer le plus grand parti des facilités qui lui furent offertes. L’accroissement du foyer national juif et ses réalisations en plusieurs domaines sont un effort remarquable de construction dont le monde doit être fier et qui, en particulier, font honneur au peuple juif.

[…] Il serait contraire à tout l’esprit du système des mandats que la population de Palestine demeure indéfiniment sous tutelle mandataire, aussi convient-il que les habitants du pays jouissent dès que possible du droit de se gouverner eux-mêmes, droit qu’exercent déjà les habitants des pays voisins. Le gouvernement de Sa Majesté ne peut présentement prévoir la forme constitutionnelle exacte que prendra le gouvernement en Palestine, mais son objectif est le self-government, et son désir est de voir s’établir finalement un État de Palestine indépendant. Ce devra être un État dans lequel les Arabes et les Juifs partageront l’autorité dans le gouvernement de telle manière que les intérêts essentiels de chacun soient sauvegardés.

[…] Au bout de cinq années, un corps représentatif des habitants de Palestine et du gouvernement britannique devra être établi aux fins de réviser les dispositions constitutionnelles de la période transitoire et de déposer des recommandations concernant la Constitution de l’État de Palestine indépendant. Si, au terme de dix années, il est avéré que l’indépendance doive être ajournée, le gouvernement britannique consultera les habitants de Palestine, le Conseil de la SDN. et les États arabes voisins, et établira en coopération avec eux des plans pour l’avenir.

 

II. Immigration

[…] La crainte qu’ont les Arabes que ce flot se poursuive indéfiniment jusqu’à ce que la population juive soit à même de les dominer a provoqué des conséquences extrêmement graves pour les Juifs et les Arabes et pour la paix et la prospérité de la Palestine. Les troubles regrettables des trois années écoulées ne sont que la plus récente et la plus persistante manifestation de cette grave appréhension arabe. Les méthodes utilisées par les terroristes arabes contre des frères arabes et contre des Juifs méritent la plus sévère condamnation. Mais on ne peut nier que la peur d’une immigration juive indéfinie est largement répandue dans les rangs de la population arabe et que cette peur a rendu possibles ces troubles […].

En conséquence, l’immigration sera maintenue au cours des cinq prochaines années pour autant que la capacité économique d’absorption du pays le permettra, à un taux qui portera la population juive à environ le tiers de la population totale. […] Au terme de la période de cinq ans, aucune immigration juive ne sera plus autorisée, à moins que les Arabes de Palestine ne soient disposés à y consentir […].

 

III. La terre

[…] Les rapports de plusieurs commissions d’experts ont indiqué que, compte tenu de la croissance naturelle de la population arabe et de l’importance des ventes de terres arabes aux Juifs, en certains endroits il ne reste plus assez de place pour de nouveaux transferts de terres arabes, tandis qu’en d’autres endroits ces transferts doivent être limités pour que les cultivateurs arabes puissent garder leur niveau de vie actuel et que ne soit pas créée prochainement une importante population arabe sans terre. Dans ces circonstances, le haut-commissaire recevra tous les pouvoirs pour prohiber et réglementer les transferts de terres […].

Extraits du Livre blanc de la Palestine sous tutelle britannique, 1939. Source : Olivier CARRE, Le mouvement national palestinien, Gallimard/Julliard, 1977, p. 76-79.

Le rapprochement sino-américain analysé par un journaliste français (1971)

« L’annonce d’une prochaine visite du président NIXON à Pékin a étonné le monde et fait l’objet d’innombrables commentaires. Comment la Chine qui ne cesse de dénoncer la politique d’agression des États-Unis a-t-elle pu accepter le principe de cette rencontre ? Quelles raisons ont pu pousser le gouvernement de Washington à faire ce geste […] ?
Certes, les facteurs qui ont dû pousser les États-Unis dans le sens de cette détente sont nombreux. […] Parmi ceux qui peuvent être considérés comme prépondérants probablement faut-il retenir dans l’ordre, l’espoir de faciliter le règlement du conflit vietnamien, la perspective de l’élection présidentielle de 1972, la question de l’entrée de la Chine à l’ONU et la volonté de faire pression sur l’URSS. Les raisons qui ont pu amener la Chine populaire à accepter le dialogue sont tout aussi importantes.
La première, qui est d’ordre très général, tient évidemment à la crainte qu’éprouve le gouvernement de Pékin de voir ceux de Washington et Moscou s’entendre contre lui sur un certain nombre de points. Quelle que soit l’idée que l’on se fasse de l’avenir de la détente sino-américaine, on ne peut nier la réalité actuelle et le danger qu’elle fait courir au gouvernement de Pékin. La Chine est un pays pauvre et le restera probablement encore pour un certain temps. C’est dire que sa puissance, pour de nombreuses années encore, ne pourra être fondée sur sa capacité industrielle mais sur son dynamisme politique et son habileté diplomatique. Le seul moyen dont dispose le gouvernement chinois pour s’affirmer sur la scène internationale, c’est de faire échec à tout rapprochement entre les deux super-puissances. »

 

Extrait de l’article de François JOYAUX, publié dans le Monde diplomatique en septembre 1971 et cité dans « Confucius, Mao, le marché… jusqu’où ira la Chine ? », Manière de voir 85, février-mars 2006.

La construction européenne et l’élargissement résumés par un commissaire européen (2011)

« Après être passée de six membres dans les années 1950 à 27 membres depuis 2007, l’Union européenne (UE) compte maintenant plus de 500 millions d’habitants. S’étendant de l’Atlantique à la mer Noire, elle réunit désormais les régions occidentales et orientales de l’Europe.
La Communauté économique européenne avait été créée pour favoriser la paix et la stabilité du continent, et l’objectif de l’UE conserve aujourd’hui toute la pertinence qu’il avait alors. De nouveaux membres se sont joints à l’aventure et l’UE est devenue plus prospère, plus forte et plus influente.
La politique d’élargissement de l’UE fait de l’Europe un espace plus sûr, l’accent étant mis sur la consolidation de l’État de droit, tout en favorisant la démocratie et les libertés fondamentales dans tous les pays candidats, qui sont nos voisins immédiats. L’élargissement nous permet de promouvoir nos valeurs, de défendre nos intérêts et de jouer notre rôle d’acteur mondial.
Nous défendons les valeurs qui unissent l’Europe au-delà de nos frontières, sur une scène internationale marquée par les changements et les incertitudes. Une Union qui développe la coopération entre d’anciens rivaux tout en faisant respecter les normes les plus strictes en matière de droits de l’homme maintient l’influence nécessaire pour façonner le monde qui l’entoure. »

 

Stefan FÜLE, commissaire européen chargé de l’élargissement et de la politique européenne de voisinage (2010-2014), extrait de la préface de la brochure éditée par la Commission européenne, Comprendre l’élargissement. La politique d’élargissement de l’Union européenne, 2011.

Le regard d’un journaliste français sur la Chine de MAO (1965)

« Aujourd’hui, l’aspiration de la Chine à la direction de la révolution communiste est partout étalée dans les textes officiels, et c’est à chaque instant que le Quotidien du peuple* ou le Drapeau rouge* invitent les communistes à regarder vers Pékin, aussi bien les communistes des pays impérialistes que ceux des pays coloniaux ou semi-coloniaux. Partout en Chine j’ai vu affichée sur les murs l’image du vaillant prolétaire chinois guidant vers le combat ses frères noirs, jaunes et blancs. La thèse sans cesse répétée est que le marxisme-léninisme a été trahi en Occident par toutes les équipes communistes en place, en commençant par l’équipe khrouchtchévienne. […]
Dans le domaine diplomatique, le retour à la Chine signifie la fin d’un contrôle ou même d’une suzeraineté qu’exerçait Moscou sur la diplomatie chinoise. Jusqu’à une date récente, la Chine acceptait qu’une bonne partie de ses relations avec le monde extérieur passât par Moscou. Il lui était égal d’être absente de la scène internationale, ou du moins elle pouvait se le permettre, ayant assez à faire avec les problèmes intérieurs. Toute vassalité diplomatique par rapport à l’Union soviétique est aujourd’hui intolérable. Pour que le monde regarde vers la Chine, il faut que la Chine soit présente partout dans le monde. […]
Le retour à la Chine, c’est encore l’affirmation du principe de l’indépendance économique. «Comptons uniquement sur nos propres efforts », dit un slogan partout présent dans les usines […]. C’est un slogan courageux, quand il est proposé aux travailleurs chinois, puisqu’il leur demande l’énorme effort de combler le vide laissé par le départ des experts russes et de l’aide russe. […] »

 

* Il s’agit de titres de journaux chinois.

 

Robert GUILLAIN, Dans trente ans la Chine, Éditions du Seuil, 1965.

La Charte de l’Atlantique (14 août 1941)

Le 14 août 1941, alors que la guerre fait rage en Europe, le président des États-Unis Franklin Delano ROOSEVELT et le Premier ministre britannique Winston CHURCHILL se rencontrent à bord du navire de guerre Prince of Wales, au large de Terre-Neuve. Le texte énonce quelques grands principes moraux (qui ne seront pas tous respectés) qui serviront de base à la charte des Nations-unies (1942) et qui permettent de préparer l’opinion publique américaine à une entrée en guerre ultérieure de leur pays.

 

« Le Président des États-Unis et M. CHURCHILL, Premier Ministre, représentant le Gouvernement de Sa Majesté dans le Royaume-Uni s’étant réunis, croient devoir faire connaître certains principes communs de la politique nationale de leurs pays respectifs sur lesquels ils fondent leurs espoirs d’un avenir meilleur pour le Monde.

Premièrement, leurs pays ne recherchent aucune expansion territoriale ou autre.

Deuxièmement, ils ne désirent voir aucune modification territoriale qui ne soit conforme aux désirs librement exprimés des populations intéressées.

Troisièmement, ils respectent le droit qu’ont tous les peuples de choisir la forme de Gouvernement sous laquelle ils entendent vivre ; et ils désirent voir restituer, à ceux qui en ont été privés par la force, leurs droits souverains.

Quatrièmement, ils s’efforceront, tout en respectant comme il se doit leurs obligations existantes, d’assurer, sur un pied d’égalité, à tous les États, grands et petits, vainqueurs ou vaincus, l’accès et la participation, dans le monde entier, au commerce et aux matières premières indispensables à leur prospérité économique.

Cinquièmement, ils désirent faire en sorte que se réalise, dans le domaine économique, la plus entière collaboration entre toutes les nations, afin d’assurer à toutes de meilleures conditions de travail, le progrès économique et la sécurité sociale.

Sixièmement, une fois définitivement détruite la tyrannie nazie, ils espèrent voir s’établir une paix qui offrira à toutes les nations les moyens de demeurer en sécurité à l’intérieur de leurs propres frontières et qui assurera à tous les êtres humains de tous les pays la possibilité de vivre durant toute leur existence à l’abri de la crainte et du besoin.

Septièmement, une telle paix doit permettre à tous les hommes de parcourir sans entrave les mers et les océans.

Huitièmement, ils sont convaincus que toutes les nations du monde, pour des motifs aussi bien réalistes que spirituels, devront finir par renoncer à l’usage de la violence. Puisqu’à l’avenir aucune paix ne saurait être durable tant que les nations qui menacent ou pourraient menacer de commettre des actes d’agression en dehors de leurs frontières continueront à disposer d’armements terrestres, navals ou aériens, ils sont convaincus qu’en attendant l’institution d’un système permanent de sécurité générale établi sur des bases plus larges, il est essentiel de désarmer ces nations. En outre, ils entendent faciliter et encourager toutes autres mesures pratiques susceptibles d’alléger, pour les peuples pacifiques, le fardeau des armements. »

 

Charte de l’Atlantique, 14 août 1941.

La Chine fragilise l’économie japonaise (2012)

« Après la tempête diplomatique autour des îlots Diaoyu/Senkaku, revendiqués à la fois par la Chine et le Japon, les constructeurs nippons évaluent leurs pertes sur le premier marché mondial.

Parmi les trois grands japonais présents en Chine, le grand perdant s’appelle Nissan. Mardi 6 novembre, l’allié de Renault a dévoilé des résultats décevants, en retrait de 2,8% au premier semestre. […]

La montée du sentiment anti-japonais, depuis la fin de l’été, auprès des consommateurs chinois a toutefois eu raison de l’objectif de production de 10 millions de véhicules en 2012 que s’était assigné le groupe en début d’année. […]

Depuis septembre, rien ne va plus en Chine pour les constructeurs japonais. Les ventes de Toyota ont baissé de 48,9 % en septembre, celles de Honda de 40,5 %, et celles de Nissan de 35,3 %. […]

Au cours de l’été, les photos de voitures de marques japonaises retournées et parfois en flammes firent le tour de Weibo, le Twitter chinois, nourrissant la colère mais suscitant également un débat puisque les véhicules en question sont produits localement par des ouvriers chinois.

Le mois dernier, le richissime homme d’affaires CHEN Guangbiao a tranché en acquérant 43 autos de la marque Geely* afin de les offrir aux Chinois dont le véhicule avait été endommagé, « pour preuve de leur patriotisme ». Entouré de drapeaux de la République populaire, il s’était vanté lors d’une cérémonie d’avoir dépensé 5 millions de yuans (près de 627 000 euros) dans l’opération.

Dans ce contexte, les constructeurs japonais ont dû ralentir les cadences de leurs chaînes de production. Nissan a fermé ses usines pendant les congés entourant la fête nationale chinoise du 1er octobre, et la production n’a repris que le 8 octobre à un rythme limité. Toyota, qui possède neuf sites en Chine, avait réduit de moitié sa production début octobre avant de passer à 30 % de baisse par rapport à son rythme normal plus tard dans le mois.

Aux différends diplomatiques se superposent les erreurs stratégiques des constructeurs nippons en Chine. Alors que Volkswagen ou General Motors ne cessent de présenter des modèles spécifiquement conçus pour les conducteurs chinois, les Japonais proposent aux consommateurs locaux des véhicules pensés… pour les Américains ou les Européens. »

* Geely : constructeur automobile chinois.

 

Philippe JACQUE et Harold THIBAULT, « La Chine fragilise l’automobile japonaise »,  Le Monde, 6 novembre 2012.

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