Le contrôle des réseaux de communication, un enjeu pour les dirigeants africains

Joan TILOUINE, « Couper Internet, la nouvelle tentation des régimes africains », Le Monde Afrique, 2 janvier 2019.
 

Le 31 décembre 2018, lendemain d’un scrutin présidentiel (organisé avec deux ans de retard…), le président sortant de la République démocratique du Congo (RDC), Joseph KABILA, a décidé de suspendre Internet et les SMS dans ce pays de 90 millions d’habitants où l’accès à Internet ne concerne que 4 % de la population. Une telle manœuvre avait déjà été réalisée dans un contexte similaire il y a deux ans, et elle concerne de nombreux États africains, comme au Congo-Brazzaville. Les motifs invoqués sont alors souvent les mêmes : assurer la sûreté nationale, éviter les débordements, empêcher la circulation des résultats ou de fake news.

Le contrôle des télécommunications par les pouvoirs dépasse souvent le cadre électoral. Bloquer les réseaux sociaux permet d’étouffer la contestation et de briser l’organisation des militants. Mi-décembre, c’est le Soudan d’Omar AL-BACHIR, surpris par des manifestations d’ampleur, qui a privé son peuple d’Internet. D’autres États pratiquent aussi la « coupure » comme le Maroc. D’ailleurs, elle peut favoriser le développement d’activités souterraines, comme la revente de cartes SIM des pays voisins…

Les télécommunications font aussi l’objet d’une surveillance. L’article note que « ces dernières années, certains régimes se sont d’ailleurs tournés vers leur partenaire privilégié, la Chine, pour s’équiper en outils de surveillance et d’espionnage de l’activité numérique de leurs citoyens, quitte à voir leurs administrations espionnées en retour par Pékin. […] L’industrie du cyberespionnage, chinoise, israélienne, européenne et russe notamment, fournit de plus en plus de services aux régimes friands de ces solutions sophistiquées permettant de surveiller leurs opposants. Parmi les meilleurs clients connus figurent l’Éthiopie, le Soudan, le Cameroun, le Maroc, le Congo-Brazzaville, la Tanzanie, le Zimbabwe, le Rwanda… »